En préambule, on peut noter que depuis la Recommandation 924 du Conseil de l’Europe, qui date maintenant de 1981, il était recommandé un égal traitement des couples, de même sexe, ou de sexe différent. En cela, l’invention par la gauche d’un contrat spécial montre bien leur incompréhension de la notion même d’égalité républicaine. On peut aussi noter que la présidence actuelle de l’Union Européenne entend insister sur l’égalité des droits des citoyens homosexuel, et faire cesser la discrimination.
Le plus gros défaut du pacs n’est pas tant d’exister lui-même, que le manque d’accès à l’union civile, à un changement de statut qui reconnaîtrait l’union entre deux personnes de même sexe, avec les mêmes obligations et privilèges. Une plus stricte séparation entre le sacrement du mariage, et l’union civile, semble indispensable pour faire avancer ce concept dans notre pays, où la notion même de laïcité est encore trop souvent mal comprise.
Faute d’union civile, le pacs constitue un pis aller, un dispositif discriminatoire. Une loi ,bâclée pour des raisons de basse politique, plus qu’une véritable avancée, réfléchie et porteuse de liberté.
Ses plus gros défauts sont :
1 – Le régime des biens est l’indivis pour tous les biens mobiliers, ainsi que pour tous les biens acquis à partir de la signature du pacs. Ceci constitue une discrimination flagrante et illogique, comparé au choix du régime des biens offert dans le contrat de mariage.
2 – Les partenaires sont tenus solidaires à l’égard des tiers des dettes contractées par l’un d’eux pour les besoins de la vie courante (large concept), sans qu’il y ait obligation d’informer le co-pacsé. On peut ainsi avoir le cas dramatique d’un partenaire créant une montagne de dettes sans en informer son partenaire, de dernier voyant ainsi tous ses biens saisis pour régler les gabegies de l’autre. Là encore, l’imprévoyance du législateur est aussi curieuse que condamnable. Dans le cas du mariage, le contrat peut protéger les conjoints contre de tels abus. Ce n’est pas le cas dans le pacs, et devrait être corrigé d’urgence.
3 – Le pacs organise la vie commune de deux individus, et pourtant, il n’est retenu que comme un élément d’appréciation de la vie familiale. Cette disposition est en violation flagrante des Droits de l’Homme : quelle différence peut-on prétendre trouver entre un couple marié sans enfants, et un couple pacsé ? Au nom de quoi la carte de séjour du conjoint étranger sera-elle délivrée au bout d’un an dans le mariage (après légitime vérification de la validité du mariage), et laissée à l’appréciation arbitraire d’un auxiliaire, au bout de trois ans, dans l’autre cas ? La même règle doit être appliqué équitablement aux couples mariés et pacsés.
4 – En cas de succession, le conjoint survivant dispose actuellement 1/4 de la propriété en usufruit. Une loi en cours de navette et adoptée à l’unanimité à l’Assemblée Nationale prévoit de porter cette part à 1/4 de la pleine propriété avec droit au logement. Dans le cas du pacs, RIEN.
L’injustice est flagrante réellement imaginer que deux partenaires partagent leur vie pendant des années, et qu’à la mort de l’un d’entre eux, il ne lui reste rien ? C’est pourtant malheureusement ce qui s’est déjà trop souvent produit dans le passé. Dans les faits, le pacs ne protége pas du tout le survivant de la rapacité de la famille du défunt.
5 – En cas de mort d’un des partenaires, l’abattement sur les droits de succession n’est que de 57 000 euros (après janvier 2000) contre 76 000 euros (après janvier 2000) pour les couples mariés. Et encore, le pacs doit avoir au moins deux ans, alors qu’aucun délai n’est demandé dans le mariage. Pourquoi cette inégalité ? Certains seraient-ils moins dignes que d’autres de survivre leur conjoint ?
6 – Le cas des enfants n’est tout simplement pas mieux prévu que dans le concubinage. Hors, l’intérêt même d’un enfant né dans le pacs demande à ce que son droit à voir ses deux parents soit respecté. En l’occurrence, la vacuité du texte, l’absence totale de dispositions en cas de rupture laisse à prévoir le déni de droits de visite, potentiellement dommageables à l’enfant. Quels que soient les modes de couples choisis par les parents, et les raisons de leur séparation, les enfants ne doivent pas en pâtir. Que les familles évoluent est indéniable, cela ne doit pas se faire au dépend des enfants, et de leur droit d’avoir deux parents, fussent-ils séparés.
Il existe quantité d’autres différences entre pacs et mariage, certaines parfaitement justifiées, dès lors qu’on a le droit de choisir. De fait, le pacs renforce la discrimination entre couples homme-femme, et couples de même sexe : les premiers ont désormais le privilège de choisir entre deux dispositifs, alors que les seconds doivent se contenter d’un statut inférieur et incomplet. La soi-disant avancée sociale inventée par la gauche n’est qu’une farce cruelle : le pacs ne fait que renforcer l’interdiction de l’union civile pour certains, et ajouter aux choix des privilégiés.
Le fait que plusieurs de nos voisins européens, ainsi que les canadiens, envisagent désormais d’ouvrir l’union civile aux couples de même sexe montre une maturité et une sagesse dont notre législateur devrait avoir la grandeur de s’inspirer. La République ne doit pas traiter différemment ses citoyens, quel qu’en soient les prétextes. A défaut, l’ombre des errements de critiquables régimes cléricaux récents pèse sur notre moderne démocratie. L’égalité est pour tous, ou elle n’est qu’un vain mot. Elle est le lien qui unit les citoyens, et renforce la République. Elle est le seul véritable rempart contre les extrémismes, et les communautarismes.
Pendant longtemps, les ségrégationnistes américains ont dénié aux noirs le droit au mariage. Il semble bien qu’ici encore, des raisons idéologiques, plus que pragmatiques, aient conduit à un pière réglementaire où certains citoyens sont traités comme des inférieurs. Nul doute que l’histoire jugera sans indulgence ces pratiques inéquitables.
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