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Homosexualité: identité de genre, culture ou politique?

A trop vouloir ne parler que des problèmes, on oublie les individus. A trop vouloir une société idéale, on en arrive à la Chine de Mao, dans laquelle toute différence, fût-elle culturelle ou même vestimentaire, était considérée comme un crime. On reconnaît immédiatement une démocratie à son respect des citoyens. Liberté d’entreprendre, certes, mais qui peut prétendre que le libéralo-communisme chinois, encore empêtré de parti unique, avec un commissaire politique derrière chaque individu, soit une démocratie ? La liberté ne se loue pas par appartements. Pas plus que l’égalité. La liberté de pensée, et l’égalité en droits de chaque citoyen sont des préalables indispensables pour parler de démocratie.

La France a eu l’immense chance dans son histoire Républicaine d’élaborer la notion de laïcité, par laquelle l’Etat est libéré de toute sujétion à l’égard de l’Eglise, autant que du pouvoir aristocratique. Les rangs sociaux héréditaires d’un système de caste archaïque nous sont ainsi épargnés. Pour la République, chaque citoyen compte. Un homme, une voix. Le pouvoir est délégué à la Nation par les citoyens. Pas par les associations, les syndicats, les bureaux d’études, les partis ou les intellectuels, encore moins par la famille ou les églises. Chaque citoyen dans le secret de l’isoloir délègue ainsi aux élus la responsabilité de le représenter. Dommage que certains l’oublient trop souvent, préférant la parole de soi-disant sages cooptés par leurs soins, à la voix du peuple.

Corollaire de l’égalité, chaque citoyen est libre de penser ce qu’il veut, et de croire ou non à la religion qui naguère dominait la société. A trop parler de liberté, cependant, on peut oublier l’autre face de la médaille : les responsabilités qui vont avec. La toute première étant le respect de l’opinion des autres. Par essence, la liberté de débat va avec la liberté de pensée. Ainsi, ce n’est pas parce qu’on est en désaccord avec l’opinion de l’autre qu’il doit être privé de la parole. Par exemple ce n’est pas parce que d’aucuns préfèrent la musique populaire à Mozart qu’on doit les priver de droit de vote. Le conformisme étant cependant ce qu’il est, les salons où l’on cause autant que les écrans sont pleins de maîtres à penser qui disqualifient avec entrain le bon peuple. Comme si soudain, la cuistrerie et la pensée rosâtre unique remplaçaient la citoyenneté. N’en déplaise aux censeurs, pas plus les évènements de 1968 que la Révolution de 1789 n’appartiennent à quiconque, sauf à l’histoire, et au peuple français tout entier. Du plus modeste agriculteur au plus brillant philosophe médiatique. Chaque citoyen a le droit de s’exprimer, qu’il soit clerc ou plébéien. C’est une des plus belles conquêtes de notre République.

De la société majoritairement rurale de l’après-guerre qui vit l’avènement de la Constitution de 1958 à notre époque, les choses ont bien changé. Dans les villes de ce début de IIIème millénaire, le maire, l’instituteur et le curé ne sont plus seuls à s’exprimer. Sur les autoroutes de l’information, chaque citoyen peut faire valoir son opinion. Dans la vie de tous les jours, le carcan de la tradition ne cloître plus les femmes, et ne blâme plus comme filles-mères des mamans célibataires aujourd’hui honorées pour leur dignité. Il a aussi fallu beaucoup de courage à Simone Weill pour qu’enfin le droit de disposer de leur corps soit reconnu aux femmes, malgré les interdits de l’église. A la manière dont aujourd’hui les jeunes filles musulmanes se débarrassent peu à peu du joug coutumier, nos mères et nos sœurs se sont progressivement épanouies en laïcité.

Quel est le tout petit élément qui a changé, en cinquante ans ? Presque rien, qui a peut-être moins à voir avec la politique et les suffragettes du 19ème siècle, qu’avec la culture républicaine. Il se trouve que les femmes, à travers notamment les journaux qui leur étaient réservé, mais aussi la vie urbaine, qui les débarrassaient petit à petit du poids des traditions, ont cessé d’accepter le sort qui leur était fait. Chaque fille-mère émigrée à la ville, reniée par sa famille, a élevé ses enfants dans le respect de la femme célibataire.

Combien de femmes ont franchi silencieusement les frontières, à l’époque, pour goûter à une liberté interdite dans leur pays ? Des familles entières ont alors mesuré la barbarie de l’interdit qui les frappait. Ce n’est pas tant les slogans du MLF qui ont changé les choses, que chaque citoyenne, chaque famille qui l’entourait, qui ont modifié notre culture. Car c’est bien cela qui a tout changé : la culture. Pas un mot d’ordre communautaire, mais tout simplement le comportement de chaque femme, et de ses proches. Au lieu de se laisser abuser, chaque citoyenne a exercé son droit à la liberté républicaine. Notamment la liberté de penser par elles-mêmes, sans laisser les autres décider à leur place.

Dans notre société, il existe encore des catégories de citoyens pour lesquels on prétend décider à leur place, au nom de l’église ou de la tradition. Au premier rang, les malheureux adolescent masculins un peu trop efféminés, ou les filles un peu trop garçonnes, par exemple. Avec une identité de genre peu en accord avec leur sexe, certains subissent des brimades à l’école, voire des manipulations mentales cruelles de la part de psys ou de maîtres de conscience à tout le moins douteux. Chaque jeune homme, chaque jeune fille qui s’évade de province ou de sa famille pour vivre son homosexualité au grand jour exerce simplement sa liberté de penser. Au nom de quoi quiconque viendrait-il lui dire comment s’habiller, avec qui s’amuser, comment et qui aimer ? Pas une République véritablement laïque, en tous cas.

Dans l’Europe qui s’élargit, les nouveaux états-membres doivent satisfaire à des critères sévères de respect de la liberté individuelle et de liberté de pensée. Ainsi, la Pologne, pourtant largement influencée par la tradition religieuse, a dû renoncer à ses lois homophobes. Le traité d’Amsterdam, puis le traité de Nice, réclament tous deux un traitement identique pour les couples de même sexe, et les unions homme-femme. La prochaine Constitution Européenne reprendra les mêmes dispositions. Pourquoi la France ne suit-elle pas l’exemple pragmatique de ses voisins néerlandais, en reconnaissant tout simplement aux homosexuels le droit de marier ? Question de culture, sans aucun doute, autant que résultat du statut discriminatoire du PACS inventé par une gauche soucieuse de maintenir des inégalités qui lui servent de fond de commerce.

Dans l’Europe de demain matin, de telles disparités de traitement entre états modernes seront difficiles à justifier. Ce ne sont pas les slogans communautaristes récupérateurs, les bars de rencontre ou les drapeaux de pacotille qui libéreront les homosexuels du joug des traditions. Ce sont les citoyens eux-mêmes, par leur comportement, par leur dignité, par leur bulletin de vote. Militants gays ou élus de la Nation, philosophes, psys et curés des plateaux télé doivent comprendre qu’à l’image des femmes naguère, le comportement de chaque individu, et tous ses proches, changent la société quel qu’en soient les résistances. Ce n’est pas en taxant de communautarisme ou en tentant de manipuler des citoyens qui subissent la discrimination que les homosexuels disparaîtront.

Ils sont français, pas extra-terrestres, et ne sont pas près de s’en aller. Ainsi, la culture change sous les pieds des puissants. Sans démagogie, mais avec pragmatisme, la République doit reconnaître tous ses enfants, et les élus doivent représenter tous leurs administrés. A défaut, c’est la France qui se déshonore.

Droite ou Gauche ?

La différence essentielle entre l’approche de GayLib, et celle autant des jacobins que des gens de gauche, tient à la place de l’individu dans la société. Pour un libéral, chaque citoyen exerce sa liberté de choix dans une République dont il représente l’élément constitutif. Ce qui implique des responsabilités, mais aussi la nécessité d’arbitrages, lorsque par exemple cette liberté est déniée ou non respectée par d’autres membres de la société. Confer la manière dont certains extrémistes homophobes prétendent dénier à d’autres citoyens le privilège de la vie privée. L’Etat est donc au service des citoyens, lorsque son intervention est requise.

En intervenant dans le débat public, GayLib ne fait que rappeler à l’Etat son obligation d’égalité, les engagements pris dans les traités d’Amsterdam et de Nice contre la discrimination, et la nécessité de respecter la vie privée des citoyens.

Pour la gauche, le citoyen n’est pas l’élément constitutif de la société, mais selon sa position sociale, soit une victime, soit un profiteur. Dans les deux cas, le citoyen lui-même a peu d’importance, seule la classe à laquelle il appartient est digne d’intérêt. A partir de cette simplification s’élabore une problématique dans laquelle il s’agit de défendre « les victimes », de « redresser les inégalités », de « rétablir la justice sociale ». Dans notre cas particulier, le fait que chaque citoyen ait déjà le droit de faire ce qu’il veut sous la couette n’a aucun intérêt politique pour les socialistes. Il faut un ensemble de victimes pour désigner ensuite des coupables, et générer un cahier de revendications capable de mobiliser les masses.

L’idée de « progrès social » ne peut ainsi s’exercer qu’au sein d’une certaine misère, en répartissant la pénurie de ressources, entre des « privilégiés », et des « opprimés ». Le Pacs est l’un des plus beaux exemples de cette idéologie. Plutôt que d’ouvrir simplement les droits du mariage aux homosexuels, ce qui aurait du même coup supprimé toute notion de « victimes », la création du Pacs a permis de conserver les inégalités nécessaires à entretenir les insatisfactions qui sont le moteur des revendications. Ce n’est pas par hasard si nombre de militants de HES sont farouchement contre l’égalité républicaine face au mariage. Faute de victimes, plus de clients. Le moteur de la gauche étant par définition l’inégalité, on comprend mieux dès lors pourquoi, en plusieurs années de règne Jospin, et malgré l’agitation de HES (association Homosexualité et Socialisme) rien n’ait été fait.

En rétablissant l’égalité républicaine, et en rappelant la nécessité de neutralité de l’état face à la vie privée des citoyens, l’approche de GayLib est toute différente : pas question de se poser en victimes. Nous sommes des citoyens comme les autres, ni plus, ni moins, et réclamons simplement, mais fermement ce qui nous est dû, sans pour autant oublier les devoirs de tout français.

Pas question de chercher des coupables, mais plutôt, d’expliquer paisiblement à nos concitoyens que des traditions arriérées n’ont plus leur place dans une société moderne. Les manifestations d’homophobie ne sont pas plus tolérable que les autres formes de racisme, d’anticléricalisme ou de misogynie. L’égalité ne se découpe pas en rondelles, et doit s’exercer de manière identique pour tous les citoyens. La discrimination, qu’elle s’exerce sous forme de statuts spéciaux tels que le Pacs, ou plus pernicieusement par le refus d’accès au droit commun tel que le mariage, est indigne du pacte républicain.

Le but de GayLib n’est donc pas de nous pleurnicher ou revendiquer, mais simplement de créer les conditions d’une citoyenneté apaisée, dans un état moderne. Contrairement aux filiales de la gauche, notre but n’est pas d’entretenir une surenchère permanente sur des sujets marginaux, mais de réfléchir sereinement aux méthodes et stratégies qui permettront le plus rapidement possible, et dans la paix républicaine, à ce que les homosexuels puissent exercer leur citoyenneté à l’égal des autres français.

On ne doit cependant pas confondre calme et faiblesse. Notre détermination restera entière, tant que subsisteront des pratiques et conceptions d’un autre âge, ou d’indécentes instrumentalisations, de la part de certains partis.

GAYLIB SE FELICITE DE LA DECISION JUDICIAIRE ACCORDANT A UN COUPLE DE FEMMES L’AUTORITE PARENTALE CONJOINTE

La justice vient d’accorder à un couple de femmes l’autorité parentale conjointe de leurs 3 filles nées par insémination artificielle, après avoir permis en 2001 à la mère non biologique de les adopter. Cette décision assure la protection juridique de ces enfants.

GayLib se félicite de cette décision exemplaire qui constitue une avancée vers la reconnaissance juridique de la famille homoparentale et qui reconnaît explicitement que l’intérêt de l’enfant est préservé au sein d’une famille homoparentale. Cependant, si la loi de mars 2002 ouvre, en théorie, la possibilité aux familles homoparentales d’accéder au partage de l’autorité parentale, elle reste en pratique quasiment inaccessible. En effet, force est de constater que son application est très contrastée selon le lieu de résidence des demandeurs.

Si cette décision constitue un espoir pour les familles homoparentales, elle ne reste qu’une étape sur le chemin de la reconnaissance juridique de ces familles, qui élèvent aujourd’hui plusieurs centaines de milliers d’enfants. La prise en compte de cette réalité sociologique passe en effet par l’aménagement des dispositions relatives à la filiation.

GayLib travaille depuis plusieurs mois à l’élaboration de propositions concernant la modification des dispositions juridiques liées à la famille et la parentalité, parmi lesquelles les problématiques liées à l’homoparentalité. En effet, la reconnaissance du parent social ne concerne pas uniquement les familles homoparentales mais également toutes les familles recomposées quel que soit le sexe des parents. Ces propositions doivent être rendues publiques prochainement.

Aujourd’hui, la justice précède le débat législatif. Il est temps que le débat national s’installe enfin au sein de nos institutions parlementaires afin que soient débattues ces questions qui concernent des centaines de milliers d’enfants.

Commission Homophobie

Les lois actuelles en matières de crimes à caractère homophobe sont elles insuffisantes? Etre homosexuel ouvertement aujourd’hui est ce encore dangereux?

L’actualité nous le montre, la réponse à ces questions est oui.

De ce constat évident, GayLib a réuni une commission sur le thème de l’homophobie, afin de proposer des mesures concrètes et applicables. Après plusieurs réunions en 2003, la commission a réfléchit et éllaboré des propositions. GayLib les a ensuite proposées au gouvernement.

Propositions contre l’homophobie

La diversité, gage de l’égalité républicaine

Jusqu’au milieu du siècle dernier, la société française était relativement homogène, en termes de tranches d’âges, de culture voire de traditions, et de religions. En gros, elle était blanche, catholique, et encore fortement agricole. La décolonisation a marqué l’arrivée de nombreux ressortissants français d’origine ethniques et de traditions variées. L’urbanisation rapide, et l’exode rural, ont entraîné un changement drastique des mentalités, tendant à remettre en cause tabous et traditions ancestrales. Par exemple, les homosexuels, ou les mamans célibataires, n’acceptent plus l’opprobre et la clandestinité. Les personnes handicapées s’affranchissent de la sous-citoyenneté dans laquelle on les aurait naguère enfermés. L’interrogation spirituelle remplace la tradition catholique ou le doute athée par un éventail d’idées et pratiques nouvelles. L’allongement de la durée de vie, dans une France débarrassée des guerres incessantes, favorise la croissance des populations d’anciens, et de plus de cinquante ans en pleine forme, dopés par les pratiques de santé, pas prêts de passer la main.

Cette remarquable diversité est une grande richesse, mais elle provoque aussi de la part de citoyens de moins en moins « prêts-à-porter » une gène accrue, face à une République qui leur semble rigide, peu encline à tenir compte de leurs besoins. Hier, la tradition codifiait de manière précise et inchangée depuis des siècles la place de chacun, et la manière dont doivent être conduites les interactions entre personnes. L’histoire commune des individus et des familles assurait un consensus social implicite. Dans des villes de plus en plus diverses, habitées par des gens venus d’ailleurs, aux tranches d’âges hétérogènes, le lien social ne va plus de soi. Le choc des cultures, autant que la souffrance d’orphelins de leur famille ou de leur village, provoque des comportements agressifs, voire une baisse du civisme. La crispation d’anciens face à des jeunes n’utilisant plus les formules de politesse n’est qu’un exemple des chocs culturels incessants ressentis dans notre société.

Malgré la granularité accrue de la population, les français restent porteurs de valeurs communes, et adhèrent aux principes universels de la république. On peut y voir pour preuve le rassemblement d’une immense majorité de français le 22 avril 2002, quels que soient leurs partis, âge, sexe, origine, orientation sexuelle, situation familiale ou état de santé.

L’enjeu du siècle qui s’ouvre sera pour la République de reconnaître et tirer partie de cette diversité. D’accueillir en son sein tous ses enfants, sans verser dans l’apartheid communautariste, ou s’égarer dans la sclérose discriminatoire. A l’inverse du « melting pot » américain, notre système social ne fonctionne pas avec des communautés séparées, et la République ne mentionne pas sur les papiers d’identité l’origine ethnique de ses citoyens. Les Etats Unis attribuent les crédits fédéraux à des structures communautaires en fonction de recensements comptant le nombre de blancs, de noirs, d’asiatiques, de latinos. Pareille pratique serait intolérable en France.

Comment cependant faire en sorte que chaque citoyen, dans une République éprise d’universalisme, puisse participer utilement à la société sans craindre un traitement défavorable ? Comment assurer l’égalité républicaine entre des populations aussi différentes que les français de souche des quartiers favorisés, et les jeunes issus de l’immigration, parqués dans les banlieues-dortoirs ? Comment éviter les frictions entre des familles ou personnes de religions différentes, et surtout comment s’assurer que la République ne cède pas à la tentation communautaire, en favorisant la majorité, au détriment des minorités ? Comment assurer l’équité, dans une société où les gens sont différents, sans se fourvoyer dans l’erreur de la discrimination positive ?

Pour ceux et celles qui ont la chance d’être nés de familles établies depuis longtemps dans notre pays, ayant fréquenté les bonnes écoles, et qui disposent du soutien de nombreux amis, il peut être difficile, voire agaçant, d’entendre la frustration de ceux et celles qui subissent chaque jour le poids de leur différence. Il peut être tentant de rationaliser les demandes en fourrant tout cela dans un gros sac marqué « communautarisme », et de l’enterrer derechef dans le cimetière des dossiers sans intérêt. Ce serait pourtant une grave erreur, potentiellement lourde de conséquences, à l’heure où toute une génération black blanc beur soupçonne qu’elle vaut mieux que les terrains de sports pour exprimer son potentiel. L’insensibilité ou l’ignorance ne peuvent être la justification de mauvais traitements.

Un citoyen qui souffre de la discrimination, voire de la persécution, ne manifeste pas le moindre communautarisme en réalisant que sa différence en est à l’origine. Lorsqu’un noir, un asiatique, un arabe, un beur ou un homosexuel, ou encore une femme, se voient refuser un travail ou une promotion, voire se font insulter du fait de leur différence, il sont victimes du communautarisme. N’appartenant pas à la communauté majoritaire, il sont rejetés. Il en est de même pour les personnes handicapées que l’on ne veut pas servir dans les magasins. C’est la même chose pour une personne âgée que l’on éconduit sans ménagement, au lieu de la recevoir. Il n’en est pas autrement lorsqu’une personne se voit refuser la pratique de sa religion.

Comment s’étonner que ceux et celles qui s’estiment maltraités cherchent à se faire entendre ? Au nom de quoi les représentants de la République pourraient-ils fermer les yeux sur des pratiques contestables, sans tenter de les corriger ? Faute de remède à cet état de fait, voire voies de fait, les victimes chercheront naturellement à se regrouper pour assurer leur défense, au sein d’associations ou collectifs communautaires. Ce n’est pas en taxant de communautarisme ces citoyens et citoyennes sans jamais les entendre, que le problème s’en ira. Au contraire : à ne pas écouter des gens qui ne demandent qu’à participer utilement à la société, on crée des passionarias dont le but n’est plus que de renverser leurs bourreaux. La sombre défaite de la droite à Paris a moins indiqué un vote communautariste gay, que le point culminant des frustrations de parisiens excédés par l’obstruction d’un régime municipal perçu souvent à tort mais parfois à juste titre, comme sourd à leurs préoccupations. La région parisienne est devenue fortement célibataire, jeune, d’origine ethnique plus variée, avec une importante population homosexuelle dont les 600 000 marcheurs annuels témoignent. Nombre de ces électeurs ont moins voté pour la gauche, que contre ces mairies d’arrondissement qui les accueillaient mal, qui refusaient les certificats de concubinage ou d’hébergement ; contre ce maire qui prétendait ne jamais recevoir les associations ou tenir compte de leurs besoins. Peut-être même sont-ils partis à la pêche, faute de candidats pour qui voter, entre une gauche clientéliste et férue de corporatisme, et une droite encore embarrassée des excés de ses membres les plus extrêmes.

Le Parlement Européen a entamé jusqu’en 2006 un programme visant à éliminer les discriminations. C’est l’occasion ou jamais pour la France de réinventer son idéal d’égalité, et de fraternité. On ne peut être libre dans un pays qui traite encore ses citoyens de manière différente selon leur origine, leur sexe, leur orientation sexuelle ou leur religion. La droite, qui a su la première ouvrir le vote aux femmes, ou comprendre grâce à Simone Weill que leur corps leur appartenait, doit aujourd’hui continuer le travail. Dans un esprit républicain, elle a le devoir de s’ouvrir sans états d’âme à la riche diversité de la population française.
Déjà, Nicolas Sarkozy a su, à la Loi sur la sécurité intérieure, ajouter l’homophobie comme circonstance aggravante des peines encourues en cas de violence, au même titre que le racisme ou l’antisémitisme (amendement Lellouche). Reste à travailler sur tout le reste : faire en sorte que la société française devienne adulte, et cesse de dénier la pleine citoyenneté à ceux et celles qui sont différents. Qu’au lieu de confronter l’autre par le rejet, elle comprenne la nécessité de créer réellement les conditions d’un authentique droit à l’indifférence qui ne soit pas une pirouette, mais bien la marque du respect et de l’écoute, dû à chaque citoyen. Le droit à l’indifférence n’existe réellement qu’entre français vraiment égaux, à condition que cessent les différences de traitement. Pour cela, il faut avoir le courage d’en débattre, avec nos valeurs, qui sont différentes de la gauche. Les socialistes proposent discrimination positive, quotas (rebaptisés parité), statuts spéciaux et usines à gaz clientélistes régentant le citoyen. Nous devons offrir la vision moderne d’une France ouverte, libérée, neutre à l’égard des origines ethniques, des croyances, du sexe, de l’orientation sexuelle, de l’état de santé. En somme, remplacer la notion archaïque d’une société traditionaliste néo-pastorale aux tabous infranchissables, par un concept moderne de laïcité humaine, un véritable libéralisme pour les individus, une bonne gouvernance, qui s’interdit l’irruption de l’Etat dans la vie privée des citoyens.

Le PACS

En préambule, on peut noter que depuis la Recommandation 924 du Conseil de l’Europe, qui date maintenant de 1981, il était recommandé un égal traitement des couples, de même sexe, ou de sexe différent. En cela, l’invention par la gauche d’un contrat spécial montre bien leur incompréhension de la notion même d’égalité républicaine. On peut aussi noter que la présidence actuelle de l’Union Européenne entend insister sur l’égalité des droits des citoyens homosexuel, et faire cesser la discrimination.

Le plus gros défaut du pacs n’est pas tant d’exister lui-même, que le manque d’accès à l’union civile, à un changement de statut qui reconnaîtrait l’union entre deux personnes de même sexe, avec les mêmes obligations et privilèges. Une plus stricte séparation entre le sacrement du mariage, et l’union civile, semble indispensable pour faire avancer ce concept dans notre pays, où la notion même de laïcité est encore trop souvent mal comprise.

Faute d’union civile, le pacs constitue un pis aller, un dispositif discriminatoire. Une loi ,bâclée pour des raisons de basse politique, plus qu’une véritable avancée, réfléchie et porteuse de liberté.

Ses plus gros défauts sont :
1 – Le régime des biens est l’indivis pour tous les biens mobiliers, ainsi que pour tous les biens acquis à partir de la signature du pacs. Ceci constitue une discrimination flagrante et illogique, comparé au choix du régime des biens offert dans le contrat de mariage.

2 – Les partenaires sont tenus solidaires à l’égard des tiers des dettes contractées par l’un d’eux pour les besoins de la vie courante (large concept), sans qu’il y ait obligation d’informer le co-pacsé. On peut ainsi avoir le cas dramatique d’un partenaire créant une montagne de dettes sans en informer son partenaire, de dernier voyant ainsi tous ses biens saisis pour régler les gabegies de l’autre. Là encore, l’imprévoyance du législateur est aussi curieuse que condamnable. Dans le cas du mariage, le contrat peut protéger les conjoints contre de tels abus. Ce n’est pas le cas dans le pacs, et devrait être corrigé d’urgence.

3 – Le pacs organise la vie commune de deux individus, et pourtant, il n’est retenu que comme un élément d’appréciation de la vie familiale. Cette disposition est en violation flagrante des Droits de l’Homme : quelle différence peut-on prétendre trouver entre un couple marié sans enfants, et un couple pacsé ? Au nom de quoi la carte de séjour du conjoint étranger sera-elle délivrée au bout d’un an dans le mariage (après légitime vérification de la validité du mariage), et laissée à l’appréciation arbitraire d’un auxiliaire, au bout de trois ans, dans l’autre cas ? La même règle doit être appliqué équitablement aux couples mariés et pacsés.

4 – En cas de succession, le conjoint survivant dispose actuellement 1/4 de la propriété en usufruit. Une loi en cours de navette et adoptée à l’unanimité à l’Assemblée Nationale prévoit de porter cette part à 1/4 de la pleine propriété avec droit au logement. Dans le cas du pacs, RIEN.

L’injustice est flagrante réellement imaginer que deux partenaires partagent leur vie pendant des années, et qu’à la mort de l’un d’entre eux, il ne lui reste rien ? C’est pourtant malheureusement ce qui s’est déjà trop souvent produit dans le passé. Dans les faits, le pacs ne protége pas du tout le survivant de la rapacité de la famille du défunt.

5 – En cas de mort d’un des partenaires, l’abattement sur les droits de succession n’est que de 57 000 euros (après janvier 2000) contre 76 000 euros (après janvier 2000) pour les couples mariés. Et encore, le pacs doit avoir au moins deux ans, alors qu’aucun délai n’est demandé dans le mariage. Pourquoi cette inégalité ? Certains seraient-ils moins dignes que d’autres de survivre leur conjoint ?

6 – Le cas des enfants n’est tout simplement pas mieux prévu que dans le concubinage. Hors, l’intérêt même d’un enfant né dans le pacs demande à ce que son droit à voir ses deux parents soit respecté. En l’occurrence, la vacuité du texte, l’absence totale de dispositions en cas de rupture laisse à prévoir le déni de droits de visite, potentiellement dommageables à l’enfant. Quels que soient les modes de couples choisis par les parents, et les raisons de leur séparation, les enfants ne doivent pas en pâtir. Que les familles évoluent est indéniable, cela ne doit pas se faire au dépend des enfants, et de leur droit d’avoir deux parents, fussent-ils séparés.

Il existe quantité d’autres différences entre pacs et mariage, certaines parfaitement justifiées, dès lors qu’on a le droit de choisir. De fait, le pacs renforce la discrimination entre couples homme-femme, et couples de même sexe : les premiers ont désormais le privilège de choisir entre deux dispositifs, alors que les seconds doivent se contenter d’un statut inférieur et incomplet. La soi-disant avancée sociale inventée par la gauche n’est qu’une farce cruelle : le pacs ne fait que renforcer l’interdiction de l’union civile pour certains, et ajouter aux choix des privilégiés.

Le fait que plusieurs de nos voisins européens, ainsi que les canadiens, envisagent désormais d’ouvrir l’union civile aux couples de même sexe montre une maturité et une sagesse dont notre législateur devrait avoir la grandeur de s’inspirer. La République ne doit pas traiter différemment ses citoyens, quel qu’en soient les prétextes. A défaut, l’ombre des errements de critiquables régimes cléricaux récents pèse sur notre moderne démocratie. L’égalité est pour tous, ou elle n’est qu’un vain mot. Elle est le lien qui unit les citoyens, et renforce la République. Elle est le seul véritable rempart contre les extrémismes, et les communautarismes.

Pendant longtemps, les ségrégationnistes américains ont dénié aux noirs le droit au mariage. Il semble bien qu’ici encore, des raisons idéologiques, plus que pragmatiques, aient conduit à un pière réglementaire où certains citoyens sont traités comme des inférieurs. Nul doute que l’histoire jugera sans indulgence ces pratiques inéquitables.